1. Constat et enjeux - Le transport et la logistique face à la saturation de l'espace urbain
La croissance de la logistique urbaine va fortement s'accélérer dans les années à venir. Chaque jour, une personne sur dix est destinataire d'un colis et le marché de la logistique croît de 5% par an. D'ici à 2030, les livraisons ultra urbaines augmenteraient de 8% par an selon les scenarii envisagés au sein de treize pays. A horizon 2050, le fret routier urbain mondial augmenterait de +2%.
Au sein de l'urbain (les villes), l'"ultra urbain" est particulièrement saturé. L'ultra urbain représente 5% de la population soit 3 millions de personnes au sein de "l'urbain" en France et moins de 1% du territoire : Paris, Lyon, Marseille, Nice et Toulouse. Ces zones sont en moyenne 4,4 fois plus denses que les autres grandes villes françaises et leur taux de congestion est supérieur à 30%.
Dans ces espaces urbains déjà saturés, la hausse des flux logistiques confronte ainsi les acteurs de la logistique à quatre enjeux majeurs :
Enjeu 1 – Les acteurs de la logistique confrontés à une complexité croissante des attentes clients : chaque individu devenant client à part entière de la logistique
Le B2C définit désormais autant les besoins de la logistique que le B2B. Le secteur du B2B représente 80% des flux logistiques ultra urbains en France, mais avec la croissance de l'e-commerce alimentaire et non alimentaire, le B2C se développe et change profondément les normes en matière de livraison à domicile.
La population ultra urbaine est la première cible des services de livraison à domicile car elle se caractérise par un pouvoir d'achat supérieur à la moyenne nationale, une motorisation limitée et de fortes contraintes temporelles. A Paris, plus de 60% de la population choisit ce mode de livraison pour l'alimentaire, contre 37% pour le territoire national.
Les clients attendent des entreprises des efforts importants en matière de coûts, de délais, de praticité et de flexibilité. Cette tendance est accentuée par la surenchère des acteurs comme Amazon Prime, et le développement des services de livraison "ultra rapides" qui changent le référentiel temporel.
Enfin, la crise de la Covid-19 a eu des conséquences sur la densification de la logistique urbaine notamment via une accélération de la pénétration du commerce alimentaire en ligne, et le développement des modes alternatifs à la livraison à domicile.
Enjeu 2 – Des embouteillages, de la pollution et des nuisances sonores à endiguer de la logistique urbaine
L'intensité croissante des flux logistiques est à l'origine de nuisances pour les populations, or les véhicules logistiques représentent 20% du trafic urbain et causent 30% de la pollution en ville.
Face à ces nuisances, les villes ont développé plusieurs types de solutions pour réguler les flux logistiques et renforcer leur prise en compte dans l'élaboration de leurs politiques (e.g. restrictions de circulation dans certaines zones ; incitation à la conversion des véhicules utilitaires vers des énergies moins polluantes ; établissement de péages urbains pour le fret)…
Enjeu 3 – Un durcissement des cadres législatifs français et européen
Les acteurs de la logistique urbaine sont par ailleurs confrontés à des évolutions fortes du cadre réglementaire, accélérant la migration de leurs flottes vers des véhicules plus respectueux de l'environnement. En France, par exemple, la Loi d'Orientation des Mobilités (2019) prévoit le "verdissement des mobilités" avec la fin de la vente d'ici à 2040 des véhicules "à carburants fossiles". En Europe, d'autres villes ont initié des démarches similaires. Depuis le 1er janvier 2020, les véhicules diesel sont proscrits dans les rues de Copenhague et d'Oslo.
Enjeu 4 – Un vivier d'emplois à professionnaliser
La crise de la Covid-19 a évidemment mis en valeur la contribution essentielle de la logistique pour l'économie du pays et a fortiori de la logistique urbaine pour l'activité des commerces en ville. La livraison en ville est génératrice d'emplois, mais est souvent controversée en raison de la nature précaire des contrats et des conditions de travail. Aussi, la régulation de ces emplois est cruciale pour garantir une protection minimum des personnes, des contrats plus pérennes et une formation renforcée des chauffeurs-livreurs.