Quelle est la situation des entreprises, comment souhaitent elles atteindre l’objectif « net zéro » et à quelle échéance ?
Une étude Roland Berger et Swissmem sur les motivations, les ambitions et les mesures concrètes mises en place par les entreprises
Les émissions de scope 3 sont de plus en plus souvent considérées comme le prochain objectif essentiel dans la course vers l’objectif « net zéro », mais les données fiables et les comparatifs sont rares : Roland Berger a donc décidé de se joindre à Swissmem pour étudier 167 de ses entreprises membres afin de déterminer la position actuelle des entreprises industrielles pour cette thématique clé : Quelle importance attachent-elles à la réduction des émissions de scope 3 ? Quelles sont leurs motivations ? Quelles sont les méthodes et les objectifs fixés en matière de réduction ? A quelle échéance ? Roland Berger a publié un bref document d’information qui résume les conclusions de cette étude, la première du genre, et souligne clairement l’état des lieux actuels et les obstacles qui devront être surmontés. Il établit également les conditions nécessaires pour que les émissions de scope 3 puissent être réduites à grande échelle et de manière mesurable.
Le protocole des gaz à effet de serre (GES) distingue trois catégories, dites « scopes », d’émissions de GES.
Les émissions de scope 1 émanent directement des (re)sources possédées et contrôlées par l’entreprise. Il s’agit par exemple de la combustion de carburant directement provoquée par ses processus de fabrication, d’émissions issues de sa flotte de véhicules, et d’émissions fugitives.
Les émissions de scope 2 sont des émissions indirectes liée à la génération de l’électricité, de la vapeur, du chauffage et du refroidissement acquis par l’entreprise pour sa propre utilisation.
Les émissions de scope 3 sont toutes les autres émissions indirectes issues de maillons différents de la chaîne de valeur de l’entreprise ; les émissions générées par la livraison d’un produit à un client, les émissions générées par les fournisseurs de pièces détachées, ou encore les émissions générées par la consommation d’énergie lors de l’utilisation des produits de l’entreprise par le consommateur, par exemple.
Des pas importants ont déjà été franchis en matière de réduction des émissions de scopes 1 et 2, mais les émissions de scope 3 peuvent représenter nettement plus de 90 pourcents des émissions totales générées par une chaîne de valeur donnée, et il a fallu attendre jusqu’à aujourd’hui pour que leur potentiel soit pris au sérieux. Les clients qui souhaitent réduire leurs émissions de scopes 1 et 2 répercutent leurs exigences sur d’autres maillons de la chaîne de valeur dans son ensemble : les émissions de scope 3, sur lesquelles cette étude se concentre.
Composition du groupe étudié
Les 167 entreprises membres de Swissmem qui composent l’échantillon étudié sont de tailles diverses. Elles sont actives dans une large gamme de secteurs d’activité et servent des clients appartenant à divers domaines. L’étude s’est principalement concentrée sur des entreprises basées en Suisse dans le domaine de l’ingénierie et de la
production industrielle
. Une sélection d’acteurs pertinents, basés aux Etats-Unis et en Europe, a servi de comparateur.
Motivations et impacts
Au-delà d’un engagement intrinsèque en faveur d’une atténuation du
changement climatique
, les conclusions de l’étude sont claires : la pression de la part des investisseurs et des clients est un facteur majeur qui pousse les entreprises à faire face à la thématique de la réduction des émissions de scope 3. Les employés et l’opinion publique poussent en grande partie dans la même direction, et la concurrence, elle aussi, met en place ses propres mesures : beaucoup de répondants considèrent donc qu’il n’y a pas d’alternative, et qu’il faut mettre l’accent sur ces émissions.
Les participants à l’étude s’attendent naturellement à ce qu’une baisse des émissions de scope 3 aide à ralentir le réchauffement climatique. Au regard de leurs motivations, elles espèrent aussi que les mesures mises en place auront un effet bénéfique à la fois sur leur marque employeur et sur la satisfaction clients. Un large cinquième d’entre elles s’attend également à des gains tangibles en matière de chiffre d’affaires et de résultats.
Une volonté théorique, mais des obstacles pratiques
Après une définition de ce qu’incluent et excluent les émissions de scope 3, l’étude met en évidence des objectifs ambitieux en termes de réduction du volume (jusqu’à 50%) et d’échéance (d’ici 2030, même si d’autres dates sont également évoquées). Cette euphorie est quelque peu refroidie, cependant, lorsque l’on réalise que près de la moitié des répondants considèrent d’autres défis comme prioritaires par rapport à la réduction des émissions de scope 3.
Certaines raisons pratiques compliquent aussi la mise en œuvre de ces objectifs théoriques. D’une part, l’absence de KPI clairement définis et universellement applicables permettant de mesurer de manière fiable les progrès en matière de réduction des émissions de scope 3. Par ailleurs, aucune méthodologie cohérente permettant de collecter les données nécessaires n’existe actuellement. Les participants à l’étude considèrent ces deux questions comme des obstacles majeurs, qu’il faudra surmonter grâce à une approche collaborative.
Marche à suivre
L'achat de biens et de services plus écologiques et le développement de machines moins consommatrices d’énergie sont considérés comme deux possibilités d’agir pour réduire les émissions de scope 3. Ces deux options nécessiteront le développement de compétences en matière d’innovation. Cependant, l’étude souligne aussi de manière univoque le besoin d’un cadre central coordonnée –notamment du point de vue juridique — qui permettrait aux entreprises de coopérer avec leurs fournisseurs et leurs concurrents de manière significative (et comparable), pour que des objectifs théoriques ambitieux puissent se traduire par des avancées tangibles.
La conclusion la plus importante est donc peut-être que la question des réductions de scope 3 est encore, dans une très large mesure, un travail en cours. La collaboration, la coordination et un processus de consultation étroit seront nécessaires à l’avenir. Roland Berger et Swissmem encouragent les entreprises de toutes tailles à participer activement au débat pour aider à concevoir un avenir
plus écologique pour l’industrie
.
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Étude
Réduire les émissions de scope 3 : la prochaine étape vers la décarbonation
Une étude Roland Berger et Swissmem se penche sur les motivations, les ambitions et les projets concrets.