Six principes pour en finir avec la diagonale du vide (des transports) 2/2
Les Assises Nationales de la mobilité ont mis en lumière la problématique de la mobilité en zone diffuse et ses enjeux sociaux et environnementaux. Dans la perspective de la future loi sur les mobilités, le rôle et les moyens qui seront donnés aux pouvoirs publics seront décisifs pour faire émerger et déployer les solutions les plus adaptées.
Voici les quelques principes fondamentaux à intégrer.
- Premier principe : clarifier les responsabilités et la gouvernance
Le premier levier est d'abord institutionnel et renvoie à la diagonale du vide. Quelle autorité organisatrice se considère aujourd'hui en charge de mettre en place les solutions adaptées à ces territoires de manière intégrée ? Aujourd'hui, les régions gèrent les TER et les villes les transports à l'échelle municipale mais aucun pouvoir n'a la main sur les zones blanches. La loi à venir doit statuer sur les responsabilités et la gouvernance des autorités organisatrices de mobilité (AOM) afin que celles-ci couvrent désormais ces zones rurales.
- Deuxième principe : faciliter la compréhension du besoin
Difficile d'appliquer des schémas type sur ce type de déplacements dans ces zones.
Une compréhension fine des besoins de mobilités est donc une nécessité. L'ouverture des données de transport des acteurs de la mobilité est aussi un prérequis pour améliorer la connaissance des besoins de manière ciblée sur chaque territoire. L'organisation d'une offre internalisée ou externalisée d'ingénierie de transports au service des collectivités doit leur permettre d'analyser finement ces besoins.
Les offres existantes manquent le plus souvent de notoriété, ce qui handicape les opérateurs dans leur recherche d'une taille critique afin de rentabiliser leurs services. Il revient aux collectivités locales d'organiser la promotion de ces offres de manière beaucoup plus systématique en utilisant toute leur "force de frappe" institutionnelle.
Chacun son rôle. L'innovation viendra des industriels et des fournisseurs de services. En revanche, les Autorités organisatrices, en définissant des cadres contractuels souples et intelligents (allotissement des marchés, place pour l'expérimentation etc.), peuvent largement être un moteur décisif favoriser les solutions innovantes.
A l'image d'autres domaines, l'efficacité des financements publics est un enjeu. Quel type d'acteur subventionner ? Le voyageur, l'opérateur, le générateur du besoin de mobilité (entreprise, école, …) ?
Nous avons vu le potentiel du co-voiturage dans ces zones blanches. Adapter la fiscalité relative à ce mode de transport, l'inclure dans les "forfaits transports" ou indemnités kilométriques des entreprises contribuerait à l'installer et à l'ancrer dans le paysage.
Il est aussi possible d'inciter davantage les conducteurs en déplafonnant la limite de la rémunération, en ne la limitant pas à un strict partage des frais.
La cohérence d'une politique d'infrastructures avec la politique de mobilité se joue à deux moments. De manière "discrète", en amont lors de la construction de nouveaux pôles de vie (commerces, écoles, zones urbaines, zones commerciales), anticiper les besoins de mobilités qui seront générés afin que l'infrastructure et le service "suivent", dans l'intérêt de toutes les parties prenantes. De manière continue, dans la durée, il s'agit de faire coller les infrastructures aux évolutions en matière de mobilités : 1/ développer des lieux d'intermodalités "à valeur" pour les opérateurs et les usagers (ex : gares…) 2/ investir dans les infrastructures numériques (i.e. réseaux hauts débits / mobile) pour permettre le développement et l'accès des services de transport
Longtemps cantonnées à des expérimentations sans lendemain ou reposant sur le bon vouloir de quelques acteurs locaux, les solutions de mobilité en zone diffuse peuvent trouver aujourd'hui un deuxième souffle sous l'impulsion des opérateurs, avec l'innovation des startups et grâce aux nouvelles technologies. Il reste désormais aux pouvoirs publics de créer les conditions nécessaires au déploiement de ces solutions. Les principes identifiés ci-dessus peuvent constituer pour l'Etat et les collectivités territoriales une feuille de route claire, simple et efficace. Adossée à la fin de la fracture numérique et, dans un horizon de temps plus long, à la lutte contre l'étalement urbain, cette feuille de route doit permettre de sortir enfin de la diagonale du vide.